Ina Thiam, Mabeye Deme

L'envers du décor

Cette exposition rapproche deux photographes, deux sensibilités, qui nous emmènent loin de l'image traditionnelle de leur ville, Dakar.
Ina Thiam, connue pour ses engagements sur la place des femmes, le milieu sportif ou artistique, présente des portraits percutants, entre hip-hop, basket et jeunesse contemporaine.

Avec la série Walbeuti, Mabeye Deme mène un travail plastique et documentaire sur la rue, associant la création d’images à une recherche portant sur des dispositifs relationnels.

De nuit ou de jour, chacun dévoile et présente de manière percutante et esthétique, les scènes et la vie qu'il côtoie, à laquelle il participe et s'implique.

Mabeye Deme, Wallbeuti, L'envers du décor
Mabeye Deme, Wallbeuti, L'envers du décor, portrait
  • Vernissage

    12 mai 2022 à 19h

  • Exposition

    Du 13 mai au 25 juin 2022

  • Site web Site de Mabeye Deme

Mabeye Deme
Wallbeuti - L'envers du décor

On ne sait, au premier regard, à quelle période temporelle les images de Mabeye Deme appartiennent. Sont-elles de vieilles photos usées par le temps ? Sont-elles des images contemporaines ?

Pour certaines, on doute aussi du médium photographique : sont-elles des photos ou des peintures ou encore des gravures ? Ses images intriguent par leur texture. On devine un filtre entre l’appareil et le spectacle de la rue, dont on ne sait dire s’il est temporel –l’usure du temps- ou si le filtre est un artifice matériel, mais lequel ?

Le filtre, quel qu’il soit, n’empêche pas d’être en prise avec ce qui est photographié, autrement dit la rue et ses passants surgissent, ils ne sont pas dissimulés… Le filtre ne cherche pas à cacher ou à se cacher, il instaure plutôt une pudeur qui est garante de l’intimité du rapport qui s’établit avec la rue. L’intimité est ici synonyme de tact : une manière d’entrer en relation sans s’imposer.
Mabeye Deme est né à Tokyo d’une famille sénégalaise. Il a en grande partie grandi à Paris, en partie à Dakar et ailleurs encore. Lorsqu’il revient à Dakar, plusieurs fois par an, il fait l’expérience de l’exil constitutif de son histoire familiale. La ville lui est autant familière que distante. Le filtre lui permet de trouver une place instable pour entrer en relation avec Dakar, sans forcer l’illusion d’une immédiateté.

Il trouve sa place sous les toiles usées des tentes éphémères construites au milieu des rues des quartiers populaires dakarois. Ces tentes accueillent des cérémonies de mariage, de baptême, de décès, de fêtes en tout genre… Les tentes de toile sont montées, remontées, démontées. Elles se déchirent à force d’usure et sont recousues jusqu’à épuisement et renouvellement. Ce sont ces accrocs que Mabeye Deme recherche et qu’il exploite pour dire l’usure du temps, les ruptures, et la distance de l’exilé avec une ville, qui se dérobe toujours à son présent.

Sarah Mekdjian

 

Ina Thiam
L'envers du décor, 2017
La jeune artiste sénégalaise Ina Tiam prend des photos de mode dans des lieux couverts de détritus et de plastique autour de la capitale Dakar, pour dénoncer la dégradation de la ville.
Ses photos de jeunes filles séduisantes vêtues de vêtements coûteux, mais entourées de plastique, d'ordures et de toutes sortes de déchets, ont fait le tour du monde. C'est pourtant le scénario que la jeune photographe Ina Thiam voit quotidiennement derrière sa propre maison dans le quartier de Pikine, en périphérie de Dakar. "J'ai l'intention de choquer, et de provoquer une réaction. Si je prenais simplement des photos d'ordures, les gens ne le remarqueraient même pas, car ils y sont habitués. Je voulais que les gens se posent des questions".

Urban Doc
Ina Thiam, photographe/vidéaste et manager de projet, travaille pour l'association Africulturban qui œuvre pour la promotion et le développement des cultures urbaines. Son rôle au sein de cette association est de gérer le projet Urban Doc qui est le premier centre de documentation sur le hip-hop et les cultures urbaines au Sénégal.
"Je m'applique dans mon travail à raconter ce que je vois en images, à témoigner sans jamais trahir. En parallèle, je travaille sur des séries de photographies qui parlent de la vie quotidienne, le travail des femmes, le basket-ball (chez les femmes surtout), je photographie des jeunes filles qui se consacrent à des disciplines sportives non traditionnelles pour femmes, comme la boxe sénégalaise ou le rugby... J'ai réussi à entrer dans un monde d'hommes comme celui du hip-hop et je me suis consacrée à la photographie en signe de protestation, car je n'étais pas censée le faire, car j'étais une femme. Je sais que d'autres filles doivent lutter contre ce genre de préjugés."

François Piranda Avant